Les compositeurs composent librement. Toutefois, il existe quelques types d'écritures liés bien souvent à la structure de l'œuvre ou à son genre.
Type d'écriture où les parties (vocales ou instrumentales) se combinent horizontalement Canon Composition vocale ou instrumentale dans laquelle les parties identiques interviennent avec un certain décalage. C'est un procédé d'imitation principalement utilisé dans la polyphonie vocale au XVe et XVIe siècles. L'imitation peut être simple à mouvement direct comme dans un
canon à deux ou plusieurs voix, mais aussi à mouvement contraire (intervalles renversés), rétrograde (à l'envers) ou procédant par augmentation ou diminution du rythme du thème initial.
Formes apparentées : la
rota, la
caccia, le
round, le
catch
EXEMPLES :
L'exemple le plus populaire du canon est celui de Frère Jacques.
C'est une forme plus élaborée chez les musiciens baroques (Bach, Haendel...) : le canon à trois voix sur une basse obstinée de Johann Pachelbel est le plus connu. Mozart, Beethoven, Mendelssohn, Reger... écriront encore des œuvres se réclamant de la forme canonique, principe repris également par le compositeur de musique atonale et sérielle Anton Webern
5 Canons op. 16
Du type
Fugue
ou Fugato
Il convient de distinguer le
genre fugue de la forme fugue.
Issu du ricercare, la fugue est un type d'écriture (vocale ou instrumentale) dans laquelle les voix ou sujets (de 2 à 4 le plus souvent) entrent successivement selon un principe d'imitation aux règles bien définies. Elle comprend généralement :
1 - Exposition comprenant l'entrée successive des voix :
la voix 1 (ou sujet) dans la tonalité principale vers la quinte
la voix 2 (ou réponse) transposée à la dominante revient vers la tonique
pendant que la voix 1 fait entendre un contre-sujet
la voix 3 retour au sujet 1
la voix 4 retour à la voix 2
L'entrée des voix est variable quant à la tessiture : par exemple Voix 1 au soprano, voix 2 au ténor, voix 3 à l'alto, voix 4 à la basse.
2 - Divertissements contrapuntiques sur un fragment sur sujet ou du contre-sujet. Le dernier divertissement s'établit souvent sur une pédale de dominante tenue à la basse.
3
- Strette : les voix entrent successivement mais à un intervalle de temps très court.
Divers procédés sont utilisés dans l'écriture d'un fugato :
- écriture par mouvement contraire : à un intervalle montant du sujet correspond un intervalle descendant de la réponse.
- mouvement rythmique en augmentation ou en diminution : la réponse adopte un rythme deux fois plus rapide ou plus lent que le sujet.
- écriture en miroir accessible exclusivement au lecteur de la partition :
Écriture apparentée :
fugato
(section d'une œuvre qui utilise le principe d'entrées successives à la manière de l'exposition d'une fugue) comme dans la partie centrale de l'Ouverture à la française, par exemple.
EXEMPLES :
Jean Sébastien Bach est le maître de la fugue (qu'il fait précéder d'un prélude) notamment dans les deux livres du
Clavier bien tempéré (1722 et 1744)
Consultez l'analyse de la
Fugue n° 16 en sol mineur à 4 voix du
Clavier bien tempéré, livre I
L'Art de la fugue
BWV 1080 (1742-1750) est un ouvrage de référence quant à l'écriture contrapuntique.
Analyse du
Contrapunctus 1
Le grand interprète de Bach Glenn Gould, pour une émission de télévision, s'est amusé à composer une fugue vocale
So you want to write a fugue
Écoutez Jean-François Zygel expliquer au piano ce que sont le
contrepoint et la
fugue.
Basse obstinée, Ostinato du type Chaconne, Passacaille
La basse obstinée est un motif mélodique de quelques mesures constamment répété donnant prétexte à une série de variations. Il existe deux types de basse obstinée. La première est préexistante provenant le plus souvent d'une chanson ou d'une danse : c'est le cas du
ruggiero, de la
folia, de la
romanesca
en Italie, la seconde est créée par le compositeur lui-même comme dans la
chaconne, la
passacaille
ou le
ground
en Angleterre.
La
chaconne
et la
passacaille, toutes deux d'origine espagnole, partagent donc ce même procédé d'écriture dans leur forme la plus courante.
Chaconne
et
passacaille
sont généralement à 3 temps sur un thème de 4 ou 8 mesures. La distinction entre la passacaille et la chaconne tient dans le fait que le thème de la passacaille est régulièrement exposé à la basse alors que dans la chaconne il peut être traité plus librement apparaissant à des voix différentes, pouvant être harmonisé, etc.
Voir la page genres correspondants
EXEMPLES
=> Jean Sébastien Bach : Passacaille et fugue en ut mineur pour orgue BWV 582 (1717).
Écouter le thème à la basse exposé 20 fois.
= > Henry Purcell :
Chaconne en sol mineur Z 730
=> Jean Sébastien Bach :
Chaconne en ré mineur pour violon BWV 1004
=> Luigi Boccherini :
La Musica Notturna delle strade di Madrid op. 30 n° 6 (1780) à 7'55
=> Johannes Brahms :
Symphonie n° 4 finale op. 98 (1885)
Sans que Brahms l'ait expressément indiqué, il s'agit d'une chaconne dont le thème de huit mesures est emprunté à la
Cantate BWV 150 de J. S. Bach. Repérer le thème de la chaconne au cours des 30 variations de 8 mesures chacune.
Jean-François Zygel vous explique ce qu'est une passacaille.
Récitatif
-
Sprechgesang
Dans un opéra, un oratorio, le
récitatif
fait avancer l'action alors que l'air ou le chœur la commentent. C'est une forme vocale déclamée proche du parlé dont l'écriture est réduite à une voix (ou un dialogue) chantée avec un accompagnement rudimentaire confié généralement à une basse continue (clavecin + violoncelle) =
récitatif secco souvent débité assez rapidement (ex. Mozart). On le distingue du
récitatif accompagné où l'orchestre (les cordes bien souvent) tient des accords et intervient parfois pour souligner certains accents du texte. Notez que l'Arioso, plus mélodique, est à mi-chemin entre le
récitatif
et l'aria. Wagner, Moussorgski, Debussy... ont amplifié le principe dans le
récitatif continu où le découpage récitatif/air est abandonné : on parle aussi bien alors de
mélodie continue.
Écriture apparentée : le
Récitatif instrumental lorsqu'un instrument présente un caractère déclamatoire
EXEMPLES
Bach :
Cantate BWV 136 récitatif
Écoutez
Jean-François Zygel expliquer au piano divers types de récitatifs.
Apparenté au récitatif, le sprechgesang est un parlé-chanté instauré par Arnold Schoenberg dans son Pierrot lunaire (1912) « à mi-chemin entre une récitation parlée très emphatique et un chant véritable ». Berg reprendra le principe dans son opéra Wozzeck (chambre de Marie)
Musique mesurée à l'antique
C'est un type d'écriture pratiqué au XVIe siècle consistant à appliquer la rythmique gréco-latine aux vers français. Le poète Jean-Antoine de Baïf et le compositeur Joachim Thibault de Courville fondèrent en 1570 l'Académie de musique et de poésie dans le but d'unir étroitement (en particulier sur le plan rythmique) poésie et musique : syllabes longues = notes tenues ; syllabes brèves = notes courtes. À la métrique des vers correspond le rythme musical. Suivant Platon, la musique est donc soumise au texte. Le sens de celui-ci s'en trouve clarifié, aussi la musique mesurée à l'antique est-elle le plus souvent homophone à l'inverse du contrepoint complexe dénoncé au même moment par le Concile de Trente (1545-1563). Les poètes de la Pléiade réclamaient pour leurs vers « une diction qui soit un chant ». Cette réaction en faveur du texte aura une incidence sur l'air de cour* et la naissance de l'opéra* à la fin du siècle en Italie. Voir ces mots à la page Genres.
EXEMPLE :
Claude le Jeune : Recevi venir du printemps
rechant sur le rythme
Écriture où les parties (vocales ou instrumentales) se superposent sous forme d'enchaînement d'accords verticaux
Le Choral En réaction à la complexité de la polyphonie et l'usage du latin dans la liturgie catholique, le
choral
est le cantique de l'église luthérienne. En tant que forme, c'est donc un chant liturgique harmonisé à quatre voix sur des paroles en allemand. Le thème est emprunté au chant grégorien, adapté d'une chanson profane ou une création originale. On trouve des chorals en dehors de la liturgie dans les cantates, oratorios, passions. Aux XIXe et XXe siècles, on y fait référence dans des œuvres symphoniques et instrumentales de telle sorte que le
choral
est traité aussi comme un
genre.
Écriture apparentée :
choral pour orgue
EXEMPLE :
J. S. Bach : Passion selon Saint Matthieu : n° 10 Choral Ich bin's, ich sollte büssen
J.S. Bach : Choral Wir essen und leben wohl
Marche d'harmonie
Une marche d'harmonie ou marche harmonique consiste dans la reproduction par paliers successifs d'une formule harmonique ou mélodique. Cette progression procède par mouvement supérieur ou inférieur. Elle peut être tonale ou modulante. La première est très utilisée dans la musique baroque à titre décoratif, ornemental, comme un écho du modèle. La seconde, plus récente, est utilisée plutôt à des fins expressives.
EXEMPLES :
J. S. Bach :
Messe en si - Et Resurrexit marche harmonique ascendante à 0'49 marche harmonique descendante à 1'10 et suivant.
G. Fauré :
Nocturne n° 5 op. 37 de 4'20 à 4'30